Description
Un Cadet de Bretagne au 18e
René-Auguste de Chateaubriand Comte de Combourg (1718-1786)
d’après des documents inédits sur la vie maritime, féodale et familiale en Bretagne au XVIIIe siècle
par Georges Collas
Paris
Nizet
1949
270p
« Du père de l’illustre Chateaubriand tout le monde connaît l’image fantomatique qu’ont laissée les Mémoires d’Outre-Tombe. Ce spectre muet qui osait l’interroger? percer son mystère? Aujourd’hui un écrivain s’est trouvé qui a soulevé le voile et dessiné pour nous de pied en cap le portrait du gentilhomme armateur. M. Georges Collas a fouillé les archives de l’Amirauté mais il a eu aussi l’étonnant bonheur de mettre la main sur la volumineuse correspondance commerciale qui reposait dans un coffre de Combourg. Critique et historien de la littérature, il nous apporte une étude techniquement très solide, richement nourrie par ses sources. Et sur quel sujet! J’allais dire sur quel type! ou plutôt quels types! Car en René- Auguste de Chateaubriand il y a deux hommes. D’abord le gentilhomme « aventurier », je veux dire le fils de famille qui laisse son toit et sa mère pour fuir la déchéance de la misère et s’en va, courageusement, gagner sa vie sur l’eau. René- Auguste étudia l’hydrographie au milieu des jeunes Malouins et à vingt-deux ans, en 1740, il était enseigne « à la part », c’est-à- dire participant aux bénéfices, avec, à son acquit, trois voyages à Terre-Neuve. Capitaine en 1747, il commande « après Dieu » : c’est le rang qui lui convient. En 1753, l’année de son mariage, il se fait immatriculer au port de Nantes et pratique le commerce « triangulaire », vers la Guinée, pour la traite, puis vers les Antilles, pour en rapporter le sucre et le café. En 1755, il débarque pour s’installer à Saint-Malo comme armateur : n’a-t-il pas ses deux frères pour commander ses navires à sa place? Finalement il aura jusqu’à six bateaux voguant à la fois sur les ondes. En guerre, il substitue la course au commerce. Il gagne une fortune que, capitaliste avisé, il répartit entre des placements variés. Il acquiert le très vénérable comté de Gombourg aux descendants des antiques « avoués » de Saint-Samson. Dès lors un autre homme ressuscite en lui. A côté du grand trafiquant qui ne se détacha de la marine qu’à regret, surgit le seigneur. Il régit ses vassaux non en suzerain bonasse mais en administrateur sinon impitoyable du moins très averti de ses droits. Il mourra en 1786 avant l’écroulement de la féodalité auquel il aura contribué par ses exigences. Aussi ce cadet qui, en apparence, avait réalisé le rêve le plus éblouissant, resta mécontent, cruellement déçu. Il était à la fois très moderne et très arriéré. Et puis sa femme n’avait jamais partagé ses ambitions : la Vie animée, joyeuse, sociable de Saint-Malo lui plaisait, le séjour dans une forteresse du moyen âge, même en qualité de châtelaine, l’assommait. On comprend alors ces obsédantes méditations du grand et maigre vieillard arpentant sans cesse la salle de Combourg. On comprend ce complexe d’insatisfaction, de perpétuel désenchantement qu’il légua à son fils François-René. Ce fils qui, par ses goûts fut, lui, un grand seigneur libéral, dans toutes les acceptions de ce qualificatif, passa, comme son père, des rêves les plus radieux aux réveils les plus désillusionnants. Par tout ce qu’il apporte de neuf et sur le grand écrivain et sur la figure en si vigoureux relief de son père, ce livre mérite d’être lu et souvent relu. L’érudition s’y pare d’un style délicat mais le charme n’en fera pas oublier le profit que les historiens les plus difficiles auront longtemps à y puiser. » B.-A. Pocquet du Haut-Jussé.
couverture très légèrement abîmée en bas devant, cf. photos, intérieur propre et en très bon état